En ce petit matin ensoleillé du mois d’août, j’ai rendez-vous avec Carole, créatrice d’une savonnerie sur Oléron. Plus précisément, j’ai rendez-vous à la Baudissière avec Bernard JOUAN, artiste peintre de son état, vous vous rappelez, je vous l’ai présenté dans une précédente « Rencontre avec…. ». C’est lui qui m’a parlé de Carole et j’ai trouvé son parcours intéressant.
Tout d’abord, c’est quoi le chenal de La Baudissière ? Eh bien, c’est un joli chenal ostréicole de Dolus d’Oléron situé entre Le Château d’Oléron et Boyardville. C’est un endroit comme je les aime, intime et authentique. Enfin, presque authentique puisque les cabanes ostréicoles abandonnées ont été réhabilitées sous l’impulsion de la municipalité afin de conserver ce patrimoine bâti. Ainsi, le long du chenal, au milieu des cabanes ostréicoles, ces cabanes restaurées aux couleurs chatoyantes donnent à ce lieu tout son charme.
Presque tout au long de l’année, créateurs et artisans locaux vous ouvrent leurs portes pour vous présenter leurs créations. Ici, pas de « made in china » que de l’artisanat local.
Tout quitter pour une autre vie : créer une savonnerie sur Oléron…
C’est dans sa jolie cabane jaune et bleu de La Baudissière que Carole me reçoit et tout de suite le courant passe.
On se sent bien dans sa petite boutique au milieu des senteurs de lavande, d’oranger et autres effluves naturels.
Salariée en grande distribution depuis une vingtaine d’années, Carole en a « ras la casquette et ne peut envisager de faire ce métier jusqu’à sa retraite ». Déjà sur son temps libre, elle commence à créer ses cosmétiques avec des produits naturels et s’intéresse à l’écologie et au « zéro déchets ». Parce que du déchet…. En grande distribution, dit-elle « on en crée à profusion ». Au fil du temps, un grand fossé s’installe entre sa vie privée et sa vie professionnelle. Carole n’est plus en phase avec ses convictions.
C’est lors de vacances, que Carole et son mari Louis tombent amoureux de l’île d’Oléron. Et puis, à la fin de leur séjour, lors d’une visite dans une savonnerie… c’est le déclic ! Louis fait prendre conscience à Carole qu’elle en « connait un rayon » sur les savons, bien plus que le savonnier à qui elle a posé tout un tas de questions restées sans réponse. Pour Louis, c’est une évidence, Carole est faite pour ça.
Tout bien réfléchi, sa décision est prise et, dès son retour au travail, Carole annonce à son patron qu’elle démissionne.
Créer ses propres cosmétiques est une chose, mais les créer pour les vendre en est une autre. En effet, la règlementation est stricte dans ce domaine, et les démarches importantes.
C’est lors d’une formation à Limoges qu’elle peaufine son apprentissage pour la fabrication de savons et apprend à rédiger un dossier cosmétique afin de le faire valider par un toxicologue puis à déclarer sur le plan français et européen… Comme elle dit, « ce n’est pas juste mélanger deux ingrédients et c’est parti ».
L’aventure de La Savonnière d’Oléron débute !
Le projet se concrétise et Carole et Louis décident de s’installer et de créer leur savonnerie sur Oléron. C’est donc à Saint-Pierre d’Oléron qu’ils posent leurs valises. Dès le départ l’activité prend de l’ampleur et les créations de Carole ont du succès sur les marchés du matin et du soir. Dès lors, Louis prend part à l’aventure et Carole lui apprend à créer les savons. «on a trouvé notre équilibre».
La Savonnière d’Oléron s’installe dans une cabane de La Baudissière
Tout comme pour les Couleurs Cabanes sur le Château d’Oléron, la municipalité de Dolus d’Oléron a fait le choix de proposer les cabanes abandonnées à des artisans et créateurs. Ainsi, grâce au départ en retraite du précédent locataire, d’un dossier de candidature et d’un entretien Carole a été choisie. Ce qui a penché dans la balance du jury : pas encore de savonnerie sur le chenal et une fabrication artisanale avec des produits de qualité.
Toutefois, ce n’est pas dans sa cabane que Carole produit ses savons, c’est chez elle à Saint-Pierre. En effet, les normes sont strictes en matière de cosmétiques. Aussi, Carole a du transformer son garage en laboratoire et c’est dans sa cabane qu’elle expose et vend sa production.
C’est quoi ta journée type ?
« J’ouvre ma cabane 7 jours sur 7 de 10h à 19h heures en saison. Et si le stock diminue, je fabrique avant l’ouverture ou après la fermeture. Donc peu de temps pour profiter de l’île en été.
Notre but avec Louis, c’est de fabriquer tout le stock hors saison. En ce qui concerne la création des recettes, j’ai toujours une idée qui en pousse une autre. C’est pourquoi, en fin d’année, je sors toujours quelques nouveautés. En plus, les habitués sont en attente et aiment bien quand je sors de nouveaux produits. Et nous, nous sommes à leur écoute, comme pour la création des shampoings solides par exemple.
Le savon, un savoir-faire, tel un chef en cuisine
A la Savonnière d’Oléron Carole et Louis n’utilisent que des produits naturels. Quant à la technique de fabrication, c’est le principe de la saponification à froid. Une méthode manuelle et naturelle qui donne toute sa qualité au savon. Toutefois, cette méthode est un peu longue car, du mélange des ingrédients à la mousse onctueuse sur sa peau ….. il faut compter entre 4 et 6 semaines de séchage, c’est presque comme l’affinage d’un fromage, il faut être patient.
Pour en savoir un peu plus sur la saponification à froid, rendez-vous sur le site de La Savonnière d’Oléron.
Quelle relation as-tu avec les visiteurs ?
« J’essaie de privilégier le contact et de prendre le temps d’expliquer mes produits à chaque visiteur, la fabrication, les ingrédients… Mais parfois, quand il y a du monde dans la cabane, je m’adresse à tout le monde et je prends plaisir à échanger avec eux, à les conseiller. »
Le saviez-vous ?
Pour habituer ses cheveux à un nouveau type de lavage, il faut les « désintoxiquer » des produits chimiques présents dans les shampoings industriels. Aussi, 3 semaines seront nécessaires avant que le lavage au shampoing sec soit optimum.
Donc pour les laver, faites mousser le savon dans vos mains, puis malaxer bien votre cuir chevelu. Rincer à l’eau, puis rincer de nouveau avec de l’eau dans laquelle vous aurez ajouté du vinaigre de cidre de pommes. Pour les proportions : 2 cuillerées à soupe de vinaigre pour 700 ml d’eau.
Et hors saison, que fais-Tu ?
« Je fabrique mes produits et j’anime des ateliers dans ma cabane avec un maximum de 6 personnes à la fois à l’automne et au printemps. C’est toujours très convivial et chaque participant repart avec sa création ».
Si c’était à refaire ?
« Même si au départ je me suis posé des questions du genre : Est-ce que j’ai fait le bon choix ? Où est-ce que je m’embarque ? Bien qu’il y ait eu quelques nuits d’angoisse, il faut relativiser. En fait, on a déplacé les richesses, et notre qualité de vie est bien plus belle qu’avant.
Et puis, ici à La Baudissière, c’est super joli, j’en suis complètement amoureuse. C’est pourquoi, chaque jour quand j’arrive à ma cabane, je me dis … qu’elle chance tu as d’être là… Quand je vois la vue de mon « bureau » et puis le cadre, je me sens bien ici. Donc si c’était à refaire, je le referais à 100% »
Et dans 10 ans, où te vois-tu ?
Carole n’a pas d’hésitation et me répond direct : « J’espère que je serai encore dans ma petite cabane ! »
C’est dire si elle s’y sent bien…
Rencontre inattendue à La Baudissière
Alors que mon rendez-vous avec Carole s’achève, une rencontre inattendue… se présente
Eh bien voilà, c’est comme ça aussi que j’aime les rencontres, improvisées et conviviales. C’est autour d’un café que Carole me présente Esther et Nataly, ses « collègues » de cabanes.
Tout comme Carole, elles ont tout quitté pour assouvir leur passion et élire domicile sur l’île d’Oléron. Je ne peux m’empêcher de les questionner à leur tour.
Esther, chapelière feutrière, une femme passionnée de couleurs et de nature
C’est dans la cabane n°6 bis « L’Atelier d’Esther » que celle-ci m’accueille avec un sourire radieux et me présente ses créations de chapeaux, bijoux et accessoires. C’est une cabane tout en couleurs où bleu, orange, arc-en-ciel et autres couleurs se côtoient pour donner à ce petit espace beaucoup de chaleur. En fait, il y a pas mal de bleu… couleur préférée d’Esther.
Installée depuis plusieurs années, elle aussi a tout quitté pour venir sur Oléron dont elle est tombée amoureuse après y avoir passé plusieurs séjours. Décidément, encore une qui tombe sous le charme oléronais.
Autodidacte, elle a appris son métier de chapelière feutrière au fil de ses rencontres et de ses inspirations. Elle a travaillé pour des maisons de couture à Paris, jusqu’au jour où elle en a eu marre de la ville, des bruits…
Son métier, elle pouvait le vivre partout, alors elle a sauté le pas et a posé ses bagages sur IO.
De ses voyages, les inspirations naissent
Ses inspirations, elle les puise dans tout ce qui l’entoure et lors de ses voyages. D’ailleurs, on le voit bien dans les couleurs et les formes ethniques de ses chapeaux ou de ses bijoux.
Elle travaille le feutre comme d’autres sculptent la pierre ou modèlent l’argile. Pour elle, c’est une véritable passion. Il lui faut du temps pour la création de ses modèles, dont certains prennent plusieurs semaines de travail.
« Ici, j’ai d’autres inspirations. Ce sont l’océan et les couchers de soleil qui m’émerveillent le plus. Harmoniser les couleurs entre elles en feutrant ou en crochetant c’est ce que je préfère. Je ne peux pas me passer de jouer avec les couleurs, les nuances et les camaïeux. Ici, Dame Nature alimente mon inspiration tous les jours !
En fait, l’inspiration pour moi, c’est partout et tout le temps ! Je n’aurai pas assez d’une vie pour tout réaliser »
Le saviez-vous ?
Le feutre est un textile non tissé. C’est une technique ancienne déjà utilisée à la préhistoire antérieure au tissage, au filage ou au tricot.
Le procédé nécessite peu de matériau de base :
de la laine, de l’eau chaude, du savon, et de l’huile de coude.
Encore confectionné de manière traditionnelle en Turquie, Iran ou Mongolie, ce textile possède des qualités thermiques et imperméables. Déjà nos ancêtres l’utilisaient pour les vêtements et construisaient des yourtes pour se protéger du froid.
Une méthode simple : sous l’effet du malaxage, les écailles dont sont constituées les fibres de laine s’ouvrent et s’accrochent entre elles en y incorporant l’eau chaude et le savon.
D’autres passions ?
« Oui, j’en ai plusieurs. J’aime peindre, cuisiner, danser… »
Et si c’était à refaire ?
« Je serais artiste et je jouerais avec les couleurs. Et si je le pouvais, je plongerais dans les arcs-en-ciel ! »
D’un univers à l’autre, de l’Atelier d’Esther aux parfums d’ambiance de Nataly
De couleur crème avec sa jolie terrasse donnant sur le chenal, la cabane de Nataly invite à la détente. Cela se confirme lorsque l’on pénètre à l’intérieur où les tons sont apaisants et où il règne un doux parfum d’ambiance.
Ici, dans la cabane, c’est l’univers de Nataly, créatrice de parfum d’ambiance, « Les parfums d’Oléron ».
De Poitiers à La Baudissière, il n’y a qu’un pont
A l’instar de ses voisines de cabanes, Esther et Carole, Nataly a tout quitté pour s’installer elle aussi sur l’île d’Oléron dont elle est tombée amoureuse. Eh oui, encore une histoire d’amour avec la « Lumineuse »…
Créatrice d’objets de décoration, et formée au home staging, Nataly veut changer d’horizon.
« Je suis venue m’installer sur Oléron en 2012 après un gros coup de cœur pour cette île. Je me suis dit que je pouvais monter mon atelier ici, ressources idéales pour la création. »
Ainsi, après plusieurs mois de recherches, son activité évolue vers la création de parfums d’ambiance et elle dépose sa propre marque « Les parfums d’Oléron » en 2016.
Tout est propice à la création de nouvelles fragrances
Pour Nataly, tout est source d’inspiration pour créer ses parfums. « Je crée mes senteurs en fonction de l’inspiration du moment, des lieux qui m’entourent, du littoral et aussi des évènements de la vie. »
« Pour moi la création c’est que du bonheur, j’y mets tout mon cœur et toute mon âme. Du reste, ce qui me rend heureuse, c’est que j’ai une clientèle fidèle, qui n’hésite pas à me faire des retours agréables sur mes parfums. J’en tire une grande motivation. »
En fait, les nouvelles idées fourmillent dans la tête de Nataly. C’est pourquoi sa gamme de produits s’enrichit sans cesse. De diffuseurs aux bougies parfumées en passant par l’aromathérapie, elle vous propose une quarantaine de parfums pour vous créer un cocon zen et parfumé.
Les Parfums d’Oléron respectueux de l’environnement
Nataly très tournée vers l’écologie et les produits naturels utilise des fragrances fabriquées à Grasse. De plus, à partir de 2020, elle applique le 100% « zéro déchets » sur toute la gamme de ses produits. Que ce soit du contenant au contenu. Et, comme elle le dit, « Ce qui est bon pour la planète l’est aussi pour le porte-monnaie. » Ainsi, chez Nataly, tout est rechargeables, réutilisables et recyclables.
Nataly créatrice de parfums, mais pas que…
« J’aime la photographie, c’est pour cela que c’est moi qui gère toute la communication et les photos pour Les Parfums d’Oléron. Et c’est un régal ! J’ai un petit côté « artiste » qui ressort dans tout ce que je fais aujourd’hui, que ce soit la décoration de ma boutique où ma communication. Aussi, j’y prends beaucoup de plaisir. »
Et dans l’avenir…
« Même si ma cabane est parfaite, mon rêve est d’avoir une petite boutique pour pouvoir travailler en toute saison. Parce qu’ici à la Baudissière, l’activité reste saisonnière, il n’y a pas d’activité sur le site l’hiver. »
Si c’était à refaire ?
« Je referai sans aucune hésitation, j’aurai même dû commencer plus tôt, avoir cette envie, ce déclic plus tôt. »
Tout d’abord, merci à Bernard de m’avoir fait découvrir ce joli lieu qu’est le chenal de la Baudissière. Grâce à lui, j’ai pu rencontrer non pas une mais trois femmes passionnées par leur métier. Leurs points communs : Etre tombées amoureuses de l’île d’Oléron et avoir tout quitté pour assouvir leur passion et poser leur valise là où le cœur les a menées.
Evidemment, ce n’est pas simple, mais comme on dit « Quand on veut, on peut ! », c’est un bel exemple de réussite tant personnelle que professionnelle.
Aussi, je vous invite à venir découvrir ce petit chenal perdu au milieu des marais et à pénétrer dans les univers de Carole, Esther et Nataly.
Le chenal de la Baudissière s’anime en décembre
C’est en mode « Marché de Noël » que vous pouvez retrouver Carole, Esther et Nataly dans leurs cabanes décorées pour l’occasion en mode « Noël ». En effet, organiser ces rencontres avant les fêtes de fin d’année est un joli moyen de faire vivre le chenal de la Baudissière en hiver.
C’est pourquoi, le souhait de Carole serait que cela devienne une institution, tout comme d’autres marchés de Noël en Charente-Maritime.
Pour l’occasion, avec d’autres artisans du chenal, elles vous accueillent et vous offrent vin chaud, pain d’épices, chocolat chaud ou café dans une belle ambiance. Alors, n’hésitez pas à venir les rencontrer, vous trouverez très certainement de jolis cadeaux à faire à vos proches ou à vous-même.
Rendez-vous sur la page Facebook de Passion-Charente-Maritime où les dates seront mises en ligne dès que j’en aurai pris connaissance.